rencontre

Cette photo a été prise lors d’une répétition. Dans le film, captation du spectacle  « Pichet Klunchun and myself », la chemise de Jérôme Bel est rose, son pantalon est kaki clair et il paraît un tout petit peu plus bedonnant. En revanche, Pichet Klunchun lui est semblable, mêmes vêtements, même silhouette, droit, précis, ligne du corps parfaite, geste à la pointe, élégance, intériorité du mouvement et de l’esprit. Le spectacle commence du côté de Pichet Klunchun, J. Bel le questionne sur son art de danseur traditionnel de Khon. Pichet Klunchun explique, fait des démonstrations de sa pratique, le même geste répété trois cents fois pour commencer, les différents personnages qu’il incarne, femme, homme, démon, singe, chacun avec des données de gestes caractéristiques. Il dit aussi qu’il danse toujours en ayant conscience d’un flux d’énergie circulaire, d’où les doigts recourbés, comme le toit d’un temple.  Le Khon a des codes, un langage très précis et rien ne doit l’en écarter. Il est garant d’une tradition. Quand c’est au tour de Jérôme Bel d’être questionné,  le ton change. J. Bel explique qu’il n’est pas danseur, qu’avant de commencer à travailler, il ne sait pas ce qu’il va faire. Il cherche, il montre des choses, il considère le danseur et le public au même niveau. On sent que la démarche surprend et déconcerte le danseur thaïlandais. Pourtant au moment où Jérôme Bel montre comment il a représenté la mort sur scène (chose interdite sur une scène thaïlandaise car cela porte malheur), Pichet Klunchun est touché, parle spontanément de sa mère, au moment de sa mort. Entre les deux hommes si différents passe à ce moment-là de l’émotion pure. Comme si c’était la première fois qu'ils se rencontraient, qu'ils en parlaient.

Galerie Marian Goodman, projection à 11h, 13h, 15h et 17h, jusqu’au 18 fev. www.mariangoodman.com